J'en avais plus qu'assez d'être comme ça. Les jours passaient, se ressemblaient sans la moindre exception. Un lever bien trop tardif par rapport à ce qu'on m'avait demandé, simplement parce que j'étais incapable de me lever plus tôt, incapable de trouver la motivation de me mettre debout et de me dire "ça ira aujourd'hui, ta journée se passera bien". C'était souvent comme ça. Souvent étant un mot bien faible pour exprimer une situation qui existait depuis que j'étais jeune. J'avais peur de prendre mon téléphone, parce qu'on pouvait m'annoncer une mauvaise nouvelle. J'avais peur de sortir de la chambre du dortoir, peur de parler à une personne qui m'interpellait dans la rue, parce que cette dernière pouvait tout aussi bien me vouloir du mal, et quand on me demandait d'arrêter de faire l'idiot, je m'énervais. Ce n'était pas comme si je le souhaitais. Non. Je m'inquiétais vite, j'avais peur de ceux qui m'entouraient, comme si tout, absolument tout ce que je pouvais dire, même la vérité la plus absolue, allait être utilisée contre moi. Et pourquoi ? Parce que j'étais rongé par un stress que je ne contrôlais pas toujours.
Parfois je me demandais pourquoi est-ce que l'agence m'avait collé dans ce groupe. Moi. Le mec qui servait à rien, qui passait son temps à prendre la tête de tout le monde, qu'était pas foutu de rendre ce qu'on lui demandait au moment où il le fallait et qui repoussait toute la production. Ah ouais, parce que ça j'en avais pas parlé. Ces putains de paroles pour l'album, que j'avais oublié de rendre parce que j'avais tellement stressé à l'idée de les envoyer que je me demandais même si ça en valait encore la peine... Puis je vous parle même pas de cette émission à laquelle je suis arrivé en retard. Genre salut, je m'appelle Jesse, j'ai peur de vivre, prenez soin de moi.
Des conneries, putain. Les gens prennent pas soin des autres.
Y a des jours j'ai juste envie de m'asseoir sous mon bureau, les bras croisés, les genoux contre moi, de fermer les yeux et de foutre la musique à fond pour attendre que le temps passe. Me dire que ça ira, ouais. Que le temps va passer, puis qu'un jour ça ira mieux. Que c'est juste une phase. Sauf que c'est pas juste une phase. Après autant d'années je commence à le comprendre, et ça me fatigue tellement. C'est pas comme si parfois j'étais pas là dans le noir à espérer que mes angoisses s'arrêtent d'elles-même. Parfois je pense à des trucs stupides. Parfois je me dis... Je sais même pas... Parfois je sais juste même plus quoi penser et j'attends juste le moment d'aller me coucher.
chroniques du léviathan
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