NAE ISEUL

être seul n'était pas un problème pour iseul. c'était ce qu'il s'était répété depuis le moment où il a posé le pied à l'intérieur de cet hôtel. trop anxieux pour se mélanger avec les autres, à ne pas vouloir déranger, il s'est arrêté dans cette pièce, la première de sa tournée des lieux, intrigué. pour une fois, il n'avait pas à fuir, l'activité proposé étant quelque chose à faire seul. malgré les autres participants, son costume lui laissait assez de liberté ( à son coeur et sa nervosité ) et le cachait assez pour qu'il se glisse à l'intérieur sans un mot, suivant simplement les instructions. fallait choisir une citrouille et il n'y avait pas de choix manquants. des petites, des grandes, de longues et de courtes, il a hésité un moment, iseul. en faire une citrouille traditionnelle ? ou différente des autres ? il penche la tête, les iris cherchant la citrouille l'appelant avant de se décider à y aller pour une citrouille assez normale. il n'a jamais eu de citrouille traditionnelle, ses parents ne participaient pas aux fêtes. c'était donc à lui d'en faire quelque chose, pour la première fois. la citrouille dans les bras, il retourne à son poste, prêt pour la prochaine étape.

il pense que tout va bien, marche jusqu'à son poste, mais dans sa nervosité, il pose la citrouille sur le rebord de la table et elle tombe au sol. livide. il est livide, iseul. le regard suivant la citrouille qui roule à quelques pas de sa personne, il n'ose pas vérifier si on a vu sa bêtise ou non. il n'y a que sa vision qui commence à se brouiller sous l'anxiété, le myocarde faisant des bonds contre son torse, à se demander si c'était pas mieux de simplement passer par la porte et quitter l'hôtel pour se laisser pourrir dans son studio pour les trois prochaines années. il a tendance à paniquer rapidement, c'est quelque chose qu'il réalise, alors il pose les mains sur la table devant lui pour prendre quelques goûlées d'air avant de se diriger vers la citrouille tombée pour la prendre. clairement, en faire une citrouille traditionnelle n'était pas le bon choix, il voyait la situation comme un avertissement, le karma pointant en direction contraire. sans attendre, il retourne à la grande table pour choisir une autre citrouille, posant celle qu'il avait auparavant plus loin. cette fois-ci, il prend une citrouille plus longue et assez mince, avant de la ramener à sa table, faisant attention à ne pas la faire tomber de nouveau.

ses joues sont encore rouges de son erreur d'il y a quelques minutes – heureusement, on n'y voit rien, grace à son maquillage – mais au moins, il ne s'est pas replié sur lui-même. ça en prenait que peu pour le faire partir, la nervosité étant parfois de trop pour lui. mais il soupire avant d'y voir à suivre la prochaine étape, découper le dessus de la citrouille. c'est facile, il ne suffit que d'y prendre le couteau qui se trouve à ses côtés. et muni du couteau de sa main gauche, il n'attend pas un instant avant de s'y mettre. il pense à ces moments qui ne sont jamais arrivés, le dédain même de penser à cette famille qui le déteste. iseul a toujours su qu'on ne l'aimait pas. lui et sa soeur n'ont jamais été voulu. c'était donné qu'ils étaient exclus des activités familiales. si ça a commencé par blesser iseul, il s'est réveillé assez rapidement, délaissant ce sentiment parce que ça n'allait rien changer d'être blessé. même si parfois, ça revenait à la charge. comme maintenant. distrait, à penser à un passé lointain, il s'était presque coupé la main. heureusement, il la retire d'un geste brusque, tout juste au moment où il complète la coupure de la citrouille particulière.

iseul n'a jamais coupé une citrouille. ce n'est pas surprenant qu'en retirant le haut de la citrouille, il réalise que c'est trop petit. sa main arrive à peine à entrer à l'intérieur et c'est assez difficile d'essayer d'y enlever les entrailles. il blâme sa tête perdue dans les nuages et reprend le couteau pour continuer le boulot. et il ne peut s'arrêter d'imaginer les moqueries que lancerait son frère, s'il le voyait avoir autant de difficulté. iseul a beau vouloir l'ignorer, son frère lui manque un tout petit peu. il lui manque jusqu'à ce qu'il se rappelle la raison pour laquelle il ne lui parle plus. le sujet délicat, le coeur qui se brise presque rien qu'au rappel du passé. le sujet qu'il évitait, iseul. son frère l'avait trahi, tout comme celui qui l'avait abandonné. et s'il avait la coutume de réaliser qu'il agissait souvent en gamin, cette fois-ci, la blessure avait été trop grave pour qu'il agisse autrement. et tout comme sa blessure béante au milieu de son coeur, il termine avec difficulté l'ouverture de la citrouille. il espère pouvoir y mettre la main avec facilité, cette fois-ci.

un autre échec et iseul aurait abandonné. il est un peu trop embarassé d'avoir eu autant de difficulté à découper le haut d'une citrouille, mais il essaie d'ignorer l'anxiété qui ne fait que monter pour continuer sa tâche. après tout, il veut terminer ce qu'il a commencé. et posant la tige de côté, il fronce le nez en voyant ce qu'il doit retirer de l'intérieur. un seul toucher et il retire sa main avant de soupirer. il déteste la texture, encore heureux qu'il puisse utiliser la cuillère qu'on a laissé à leur disposition. il n'attend pas une seconde et commence à s'appliquer à la tâche. les yeux sont rivés à l'intérieur de la citrouille, enlevant la chair pour la mettre dans le bol donné pour cet effet. il pense, iseul, comment il n'a jamais eu à essayer de faire une tarte à la citrouille. même, à bien y penser, il ne sait pas plus comment en faire. est-ce la chair très peu appétissante qu'on utilise ? il espère pas, clairement. il recherchera ça plus tard, en attendant, il termine de vider la citrouille pour se jeter sur l'aspect artistique de l'activité. c'est vraiment ce qu'il attendait avec impatience, à vouloir désigner le visage, chose auquel il a pensé depuis le tout début.